Super Coraux ; Les coraux de la marina de Port Moselle détiennent-ils la clé de la survie des récifs coralliens ?
Un récif corallien bordant une marina municipale au cœur de Nouméa pourrait détenir la clé de la survie des récifs coralliens à travers le monde. Si vous êtes un scientifique spécialisé dans les symbiotes coralliens, voici peut-être votre chance de changer l’avenir des récifs coralliens.
Les découvertes scientifiques importantes sont souvent faites là où quelque chose d’inhabituel se produit, remettant en question les théories existantes. Parfois, ces découvertes ne sont pas situées dans des endroits reculés, mais juste sous nos yeux, si inattendues que leur importance n’est pas immédiatement reconnue. Les coraux des récifs montrés sur la photo, qui poussent sur la rive ouest de la marina de Port Moselle, sont à la fois surprenants et inexpliqués.
Les scientifiques spécialisés dans les coraux ont documenté le déclin des récifs coralliens sous les tropiques en raison du réchauffement climatique, de l’acidification, de la sédimentation, ainsi que des agressions chimiques et physiques. Pourtant, les coraux qui prospèrent sur la digue intérieure de la marina de Port Moselle défient toutes ces menaces et bien d’autres, survivant dans des conditions où d’autres coraux ne le peuvent pas.
La marina de Port Moselle a été construite en 1990 en plein centre de Nouméa, dans le coin sud-est du port commercial animé appelé la Petite Rade. Elle accueille plus de 900 yachts et navires de toutes tailles, des annexes aux bateaux de pêche, remorqueurs et grands navires à passagers. Une station-service pour bateaux se trouve sur la digue ouest, tandis que le marché aux produits frais et le marché aux poissons de Nouméa bordent la rive est. Voici un lien Google Earth pour visualiser la marina.
Comme le montre la photo ci-dessus, la marina est presque entièrement fermée par des digues, ne laissant qu’une entrée de 46 mètres de large. Cela limite fortement la circulation de l’eau dans la marina. Si vous pensez que l’eau y est stagnante et polluée, vous avez raison. En plein été, la température de l’eau dépasse les 32°C et descend en dessous de 20°C en hiver.
Les égouts municipaux déversent un flux constant d’eaux de ruissellement et d’eaux usées dans le bassin fermé. Lors de fortes pluies, toutes les eaux de ruissellement s’écoulent directement dans le port, souvent chargées de sédiments.
La pluie froide peut entraîner une chute rapide de la température en été, suivie d’une remontée brutale sous l’effet des marées.
Chaque matin et chaque après-midi, les employés nettoient les marchés aux poissons et aux produits frais à grande eau, et toute cette eau finit dans le port.
Des déchets de toutes sortes, parfois même des poubelles entières, sont jetés à l’eau. La marina dispose d’un bateau spécialement conçu pour récupérer les déchets flottants lorsqu’ils deviennent trop nombreux.
Environ 300 yachts de la marina abritent des résidents à l’année, parfois des familles entières. Pendant la saison de navigation, le quai des visiteurs est rempli de bateaux venus du monde entier, tous habités.
La marina dispose de sanitaires et de douches bien entretenus à terre, que la plupart des plaisanciers utilisent régulièrement. Cependant, certains utilisent encore leurs toilettes à bord et tous se servent de leurs éviers pour laver la vaisselle et se laver les mains. Les propriétaires de yachts nettoient aussi leurs bateaux de temps en temps. Nouméa possède une grande raffinerie de nickel qui émet parfois une suie noire et collante dans l’air. Les plaisanciers rincent ces retombées dans l’eau du port. Cette pollution recouvre la surface de l’eau avec les particules rejetées par les cheminées de la raffinerie.
Tous les yachts, habités ou non, rejettent divers produits chimiques, tels que des détergents, de l’eau de Javel, des diluants, des nettoyants de cale, des huiles et des résidus toxiques issus des peintures antifouling.
Les employés de la marina pulvérisent parfois des herbicides sur les trottoirs pour empêcher la pousse des mauvaises herbes. La ville traite également les zones urbaines avec des pesticides contre les moustiques. Toutes ces substances toxiques finissent dans l’eau de la marina.
Dans l’ensemble, c’est une belle marina, bien entretenue et agréable pour les plaisanciers.
Mais les coraux des récifs, ces créatures délicates et sensibles à l’eau claire et propre, ces coraux qui meurent à cause du réchauffement climatique, de la sédimentation, de l’acidification et des agressions physiques, peuvent-ils survivre à l’extrême environnement urbain de la marina ?
Scientifiques des coraux, prenez note :
Les récifs coralliens de la marina existent depuis plus de 20 ans :
Les coraux ont commencé à coloniser la marina un an après la fin des travaux, et en deux ans, l’implantation corallienne était déjà dense sur la rive sud. Ci-dessus, deux photos prises à 14 ans d’intervalle montrent leur survie continue.
Ces coraux ont résisté à des journées d’été extrêmement chaudes, à des marées rouges, ainsi qu’à des expositions prolongées au soleil brûlant, à la pluie battante et aux déversements de diesel.
Des enfants leur jettent des pierres et des bâtons.
Ils suscitent un émerveillement constant chez les touristes et les habitants qui se promènent le long du quai en les observant.
Des coraux résistants aux maladies, aux agressions physiques et à la casse
Les coraux Acropora sont les plus répandus dans la marina de Port Moselle. Leurs branches sont fines et fragiles, mais elles survivent à des agressions répétées.
Pourquoi ces coraux survivent-ils alors que d’autres meurent ? La réponse pourrait bien résider dans leurs symbiotes ultra-résistants.
Littérature citée
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